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14 février 2013 4 14 /02 /février /2013 08:41
De quoi le printemps arabe est-il le nom ?

 

La Tunisie, l’Egypte, et d’autres pays du monde arabe, sont secoués depuis deux ans par la violence qui s’est notamment traduite en Tunisie par l’assassinat de l’avocat et homme politique Chokri Belaïd, leader de gauche du Mouvement des Patriotes Démocrates et en Egypte par des émeutes qui ont fait plusieurs dizaines de morts. Pourtant, dans les deux pays cités en premier, la révolution a été apparemment couronnée de succès. Les dictateurs sont en prison ou en exil. Des élections à peu près transparentes s’y sont tenues  et les partis qui les ont gagnées gouvernent. Il se trouve que ces partis sont d’obédience islamiste. Du coup, il y a une crispation du côté des partis "laïcs" qui ne se résolvent pas à cette situation. Cette crispation se nourrit largement des évidentes démangeaisons qui taraudent les nouveaux gouvernements d’instaurer dès à présent un régime fondé sur une application stricte de la Sharia. Pour être juste, la situation est sans doute plus complexe. A l’intérieur même des partis islamistes coexistent plusieurs tendances. La plus apparente, réformiste,  est celle qui gouverne, qui a lissé son discours, qui fait tout pour offrir un visage présentable. Celle-ci fait de la démocratie turque un horizon possible. Bien que tenant les rênes du pouvoir, cette tendance n’est pas forcément la plus nombreuse. Derrière le rideau, d’autres acteurs se tiennent dans une réserve largement tactique. Eux ont en vue l’idéal de la République Islamique, comme un retour à la pureté originelle des premiers temps de la foi. Ils ne supportent pas qu’un tel idéal soit soumis aux contingences de la politique, aux compromis très humains qu’elle implique. La Loi de Dieu ne saurait s’accommoder de l’onction du peuple, déclarent-ils. Il n’y a sans doute pas de véritable hiatus idéologique entre réformistes et révolutionnaires. Les premiers ont plus que de la sympathie pour la Cité idéale que les seconds rêvent d’établir. Il y a peut-être même un partage des tâches entre eux pour que le but ultime, la prise du pouvoir, soit atteint.

La grande peur des démocrates (nommons ainsi, pour aller vite, ceux qui s’opposent à l’islamisme, bien que dans leurs rangs ou trouve bien des apprentis dictateurs !) est que cette prise du pouvoir se fasse sans retour. L’expérience de la victoire du FIS au premier tour des élections législatives de décembre 1991 nourrit cette angoisse. On se souvient en effet que le débat très vif qui avait couru dans les rangs du FIS avait débouché sur la victoire des partisans de l’utilisation de la voie électorale contre ceux qui n’en voulaient pas. Ces derniers sont restés dans l’ombre. Ils en sont sortis au lendemain de ce premier tour pour annoncer à la population qu’il lui faudrait changer ses "habitudes alimentaires et vestimentaires". D’autres ont été plus loin en expliquant qu’ils ne s’étaient ralliés à la participation au processus électoral qu’à la condition que celui-ci ne serve qu’une seule fois. Autrement dit, ils laissaient clairement entendre qu’une fois le FIS installé au pouvoir, il n’y aurait plus d’élections… Le spectre de la dictature à venir a permis que l’annulation du second tour ait pu être décidée avec, sinon le soutien, du moins le silence d’une grande partie de la population. La démocratie n’y a pas vraiment gagné au change puisque ce scénario a renforcé l’emprise du régime dont le caractère antidémocratique corrompu a précisément permis la constitution de l’alternative violente qui n’avait pour but que de remplacer sa dictature par une autre…

Le drame est là. La démocratie représentative suppose que le pouvoir soit issu de la volonté populaire que traduit le suffrage universel. Il se trouve que cette démarche a pour effet de mettre aux commandes les adversaires de la démocratie qui n’ont de cesse alors d’en saper les fondements pour installer la République sévère, mortifère, dont ils rêvent. C’est ainsi que les démocrates se retrouvent à agir à fronts renversés, appelant au "dégagement" des équipes élues. Le scénario égypto-tunisien est pendant dans tous les pays arabes, y compris dans ceux qui sont gouvernés par des islamistes "purs et durs". En cas d’élections libres, ces derniers  seraient sans doute évincés par d’autres qui le seraient davantage !

La démocratie serait-elle interdite dans le monde arabe, au motif que son exercice conduirait à confier le pouvoir à ceux dont l’ambition est précisément d’y mettre fin ? C’est sans aucun doute la question fondamentale qui est posée aujourd’hui, et qui requiert une réponse urgente…

D’abord, si on sait ce dont ne veulent pas les démocrates, sait-on vraiment ce qu’ils veulent ? Ils ont une réponse, la liberté. Vaste programme…

Eléments d’un dialogue interculturel, dans la cantine de l’Université :

Un collègue, Français :

La réponse est simple. La civilisation, c’est l’Occident. La modernité, le développement, la démocratie, en sont les preuves permanentes. C’est l’Occident qui fait reculer sans cesse les limites de la liberté, celles de la connaissance… 

Moi : Mais quel est son paradigme ?

Le collègue : Pour faire court, c’est la liberté individuelle, celle que confère le détachement de l’homme des pesanteurs qui le lestent, la tribu, le clan, voire la famille.

Qu’en est-il aujourd’hui ?

La majorité des peuples du tiers-monde a longtemps souscrit à la vision de mon collègue. Des siècles durant, colonisés, asservis, exploités, ces peuples voyaient dans leurs maîtres d’alors des modèles à suivre sitôt leurs chaînes rompues. Cette vision est encore dominante, mais de moins en moins.

On a connu une période "soft" dans les années 60. Les indépendances se succédaient à cette époque et l’Occident faisait plutôt profil bas. La contestation venait même de sa propre opinion, plus prompte à s’enflammer pour Joan Baez et Bob Dylan aux Etats-Unis, à s’opposer à l’agression du Vietnam, qu’à se rallier aux vieux conservateurs confits dans leurs idéaux racistes et colonialistes. Paradoxalement, la faveur dont a joui l’Occident à cette période vient de cette contestation même. On avait de l’admiration pour un système capable de sécréter ses propres contrepouvoirs. Boris Vian, Brigitte Fontaine ou Arezki, les réfractaires à la guerre d’Algérie, les porteurs de valises…, se faisaient sans vraiment l’avoir voulu, mais du simple fait de leur existence, les agents efficaces de la promotion de l’image de la France. Le recul relatif que l’Occident connait aujourd’hui ne tient pas tant à l’évolution de son personnel politique qu’à celle de son opinion.

Pour faire court, durant la deuxième moitié du XXème siècle, les pouvoirs en place devaient composer avec une intelligentsia largement universaliste. En Algérie notamment, mais aussi dans tout le Maghreb, en Syrie, en Orient, jusque dans Gaza, les images de cette période, témoignent du climat qui y présidait. Les photos des lycées Algériens montrent des classes mixtes. Les instantanés pris dans les rues donnent à voir des villes où se côtoient hommes et femmes. Les plus âgées portent le haïk et le "3djar", la voilette blanche qui souligne plus qu’elle ne masque le bas du visage. Aucun hidjab, aucune barbe n’apparaissent sur les épreuves. Ces images expriment, mieux que n’importe quel discours, la nature de la société dans laquelle s’inscrivait la population. Il ne s’agissait pas de passer l’éponge sur les affres de la colonisation et sur les massacres qui l’ont rythmée. Il s’agissait plutôt de l’accès aux droits que refusait le système colonial aux indigènes. En dépit des dictatures instaurées au lendemain des indépendances, l’horizon restait celui d’une société libre, démocratique, progressiste. L’Occident en était l’illustration. Il fallait reproduire les techniques, mais aussi la philosophie, par lesquels il avait réussi à faire coexister en son sein des opinions différentes, y compris celles qui le contestaient jusque dans son essence. Il fallait prendre exemple sur sa faculté à donner du sens à la citoyenneté, celle-là même dont il avait privé ses anciens sujets  et qu’ils veulent se réapproprier une fois libérés des chaînes coloniales. Dans le couple fascination-répulsion qui est depuis longtemps le prisme à travers lequel on considère l’Occident, le premier terme l’emportait largement. Le second était mis en sommeil…

Aujourd’hui, les choses ont changé. Une nouvelle classe d’"intellectuels" sonne l’abandon de la contestation et s’attelle à redonner vie à la face noire de l’Occident. Ils retrouvent les accents du XIXème siècle, son cynisme, son racisme, qui ont permis les massacres d’hier, pour justifier la mainmise occidentale sur le reste du monde. Il ne s’agit plus seulement de mainmise matérielle mais aussi de mainmise morale. Ce sont eux que l’on consulte avant de lancer une expédition contre un pays sous couvert de libération des peuples. Ce sont eux à qui l’on confie la tâche de former l’opinion pour la rendre de nouveau réceptive à un discours impérialiste. Il faut bien reconnaître, hélas, qu’ils y réussissent. La lecture des sondages donne la mesure de leurs succès. Sont-ils le produit d’une époque propice à la crispation et à la haine ou en ont-ils été les promoteurs ? Il s’agit probablement d’un lien dialectique. La différence de forme et de fond entre ces intellectuels et leurs illustres prédécesseurs réside dans le fait que ceux-ci mettaient en avant les idées de justice et de solidarité concomitamment avec l’idée de liberté en leur accordant un caractère universel.  Ceux d’aujourd’hui mettent en avant le paradigme unique de la liberté.

De quelle liberté s’agit-il ?

Dans le discours, c’est au nom de celle des Maliens, des Afghans, des Libyens, des Irakiens, (des Syriens demain ?) qu’ils appellent à un interventionnisme tous azimuts. Jadis, c’était pour "apporter la civilisation" que les armées d’Europe massacraient les populations censées en recevoir le fruit. Il n’y a pas grand-chose de changé depuis. Si, toutefois. Personne en Indochine, en Algérie, à Madagascar n’a appelé au secours les armées françaises du XIXème siècle, ce qui ne les a pas empêchés d’investir ces pays dans la violence. Aujourd’hui, force est de constater que ces appels existent désormais. Certes, on a dicté la lettre de détresse au président malien (en "oubliant" qu’il était arrivé aux commandes par un putsch qui a renversé le célèbre ATT !)  mais l’intervention française a été accueillie avec joie par une grande partie de la population. Le grand chanteur ivoirien Tiken Jah Fakoly l’exprime douloureusement dans sa dernière chanson sur la Françafrique :

Ils cautionnent la dictature 

Tout ça pour nous affamer 

Ils pillent nos richesses 

Pour nous enterrer vivants 

Ils ont brûlé le Congo

Enflammé l'Angola 

Ils ont brûlé Kinshasa 

Ils ont brûlé le Rwanda 

Encore plus douloureux est le constat désenchanté qu’il dresse : « A chaque fois que la Côte d’Ivoire est en crise, le peuple appelle la France ».

Les choses sont sans doute plus graves qu’au temps des colonies puisque des peuples qui ont subi l’asservissement en sont à demander la protection de leurs anciens bourreaux !

Ce n’est pas en vertu de la sympathie qu’éprouveraient ces peuples vis-à-vis de l’ancienne métropole. C’est le constat de la faillite politique, économique, sociale de leurs pays qui les pousse à chercher ailleurs qu’en eux-mêmes un remède. Ils savent au fond d’eux-mêmes que la faillite en question doit beaucoup à leurs anciens maîtres. Ils savent que ces derniers ont opéré un simple changement de registre, qu’ils continuent d’avoir la haute main sur leurs destinées, qu’ils continuent de nommer leur personnel politique et qu’ils le choisissent à l’aune unique de leurs propres intérêts. A l’évidence, ils sont dans l’illusion, sans doute la dernière avant d’être sommés de tenir leur rang dans l’Histoire en devenant acteurs de leurs destins.

Les peuples arabes sont exactement logés à cette enseigne. Il est intéressant de noter que les révoltes qui les ont secoués, qui les secouent encore, ont pour point de départ un phénomène ponctuel. En Tunisie, l’immolation par le feu de Mohamed Bouazizi a été le prélude au mouvement qui a emporté Ben Ali et son régime. En Egypte, ce sont les problèmes sociaux qui ont eu le même aboutissement. Au Maroc, en Algérie, les pouvoirs s’inquiète de la montée des difficultés sociales génératrices de micro-émeutes qui pourraient, si elles se fédéraient, les emporter. En Syrie, au Bahreïn, et dans une moindre mesure en Arabie Saoudite, ce sont plutôt des questions confessionnelles, notamment l’opposition entre chiites et sunnites, qui risquent de fournir les ferments des troubles à venir. L’Irak en donne une préfiguration.

Ainsi, la situation est la suivante. Une situation insurrectionnelle débouche, ou pourrait déboucher, sur un bouleversement politique marqué notamment par la question du projet de société ! Aucun débat intellectuel n’a accompagné, encore moins précédé, le vent de contestation sociale. Et c’est finalement quand on pense qu’avec la chute du dictateur l’affaire est close, que la bombe explose.

C’est cette absence de débat qui crée la situation lourde de dangers que vivent notamment l’Egypte et la Tunisie, pays censés avoir "réussi" leur révolution. Il est d’ailleurs symptomatique, en Tunisie, que les islamistes et les démocrates aient un slogan commun, celui de sauver ou de continuer la révolution, sans qu’aucun d’entre eux consente à indiquer le contenu qu’il assigne à ce terme. Pour éviter la tragédie de l’expérience algérienne, victime de sa précocité autant que du vide intellectuel dans lequel elle s’est déroulée, il faut que ce débat s’engage sans délai, avec tous les acteurs de la société. Il ne concernera pas seulement la Tunisie ou l’Egypte. Il servira d’exemple pour le monde arabe dans son ensemble.

Quels pourraient être les termes de ce débat ? Pas question d’épuiser le sujet ici. Un seul exemple.

Les démocrates doivent définir leur rapport au thème de la liberté, le contenu qu’ils lui donnent. Est-ce qu’il s’agit de la transposition à l’identique du paradigme occidental ? La question n’est pas de pure forme. Il y a une vieille opposition entre liberté et justice, entre liberté et morale, que la modernité, loin de l’épuiser, a exacerbée. On en est certes conscient en Occident puisque des garde-fous ont été instaurés pour éviter les excès de la liberté. Ces garde-fous sont en train de disparaître. En France, la Sécurité Sociale, la retraite par répartition, les lois sur le chômage, sur l’assistance aux handicapés, mesures faisant prévaloir la solidarité collective au détriment de l’individualisme, sont en train de céder devant les coups de boutoir du libéralisme. Au siècle dernier, l’Occident exerçait sa force injuste au-delà de ses frontières, contre des ennemis réputés inférieurs et qu’il était donc légal d’assujettir ou de réduire. Aujourd’hui, les frontières passent à l’intérieur des nations. L’ennemi, c’est le citoyen issu de l’immigration, le vieillard qui tarde à mourir et qui coûte à la collectivité, les minimums sociaux, le RSA, le SMIC, tous les leviers utilisés par l’Etat pour essayer d’atténuer les disparités sociales. Ces digues tombent d’autant plus facilement que leur coût financier n’est pas adossé à une contrainte morale. Il y a beau temps que les Français meurent à 80 % seuls dans les hôpitaux, que les vieux parents sont perçus comme une charge dont on se défait en les enfermant dans une maison de retraite… Le paradigme occidental, fondé sur l’absolu de la liberté individuelle, est lourd de ces dérives. Tout le monde a entendu parler de cette vieille nonagénaire mise à la porte de son institution parce qu’elle ne payait plus ses mensualités. Tout le monde s’en est scandalisé ici, en France. Mais qu’est-ce que l’opinion trouvait choquant ? Le fait que le fils, après avoir récupéré sa mère à l’hôpital où il exerçait la fonction lucrative de spécialiste, n’a eu de cesse de la remettre dans sa maison de retraite ou à l’hôpital plutôt que de l’emmener chez lui ? Pas du tout ! L’unique objet de la vindicte populaire était le directeur de la maison de retraite en question, coupable d’avoir mis une vieille femme dehors ! Personne ne s’est offusqué du fait que se propres enfants s’en soient débarrassés. Ils en avaient le droit, au nom de leur "liberté" !Au début des années 2000, la canicule qui a frappé la France a occasionné le décès de milliers de vieillards. Plusieurs dizaines d’entre eux ont été enterrés à la va-vite aux frais des communes dont ils dépendaient. Leurs enfants avaient fait "les morts" pour ne pas avoir à payer les frais des obsèques. C’était leur "liberté". Une jeune fille perd l’équilibre et tombe. Sa tête heurte le trottoir. Elle n’arrive pas à se relever. Elle a la bouche en sang. Personne pour lui porter secours, l’endroit est-il désert ? Pas du tout. La scène se passe à la Défense, quartier commercial, quartier d’affaires, l’un des plus densément peuplés de la région parisienne. Il y a foule, et cette foule enjambe la jeune fille pour vaquer à ses occupations. La liberté, vous dit-on.

Les démocrates du monde arabe ont été nourris à une autre culture, celle de l’attention aux personnes âgées, du partage, de la pudeur. Bien sûr, il y a là aussi des vieux parents abandonnés dans des hospices mais cet abandon scandalise l’opinion alors qu’il est perçu comme normal en Occident. Ce fait de civilisation est commun à l’ensemble des citoyens du monde arabe. Il peut ainsi fournir l’assise nécessaire au législateur pour qu’il arbitre en faveur de la solidarité, pour qu’il traduise les bornes morales en obligations légales.

Le cadre du débat ne dopas être le rapport à la religion mais le rapport à la civilisation. C’est la civilisation qui fournit les matériaux de la modernité. C’est la mémoire partagée qui cimente la Nation. Aucune construction politique ne peut perdurer si le peuple ne se l’approprie pas, si elle n’évoque pas en lui quelque chose de familier. Le chemin est plus long que celui qui consiste à vouloir imiter l’Autre, mais c’est le seul possible. C’est aussi le prix à payer pour évacuer la séparation religieuse. La religion est l’affaire de chacun, la vie en commun est l’affaire de tous. Pour qu’elle soit possible, il faut que tous se reconnaissent dans ses règles.

Une anecdote pour finir. Elle est révélatrice de la possibilité d’une démocratie qui ne renie rien de sa civilisation…

L’Inde est une grande démocratie. J’ai découvert ce pays dans les années 80, avec mon épouse. Première journée, shopping dans les rues de Delhi. Après un contact très sympathique avec un commerçant de la ville, il nous invite à dîner chez lui le lendemain soir. Nous prenons le train le lendemain matin pour Agra, siège du magnifique Taj Mahal. Retour en début d’après-midi. Rencontre dans le train avec un jeune Indien. Sympathie réciproque. Il nous propose de nous emmener rendre visite à sa fiancée. Sa voiture est à la gare. Il promet de nous ramener en temps et en heure chez notre hôte. Pourquoi pas ? Nous arrivons dans une très belle maison, dans la lointaine banlieue de Delhi, remplie d’une nuée de domestiques. Le thé est servi. Nous faisons connaissance avec la fiancée et sa famille très bourgeoise. Vers 19 heures, je signale au jeune homme qu’il serait temps de partir. Il répond que c’est impossible et que la famille veut absolument que nous partagions son dîner. J’ai eu beau protester, rien à faire, d’autant qu’il n’y avait aucun moyen de revenir à Delhi par nos propres moyens. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, nous nous installons à la table du dîner qui dure jusqu’à 23 heures. A 23 heures 30 enfin, le jeune homme consent à nous raccompagner. A minuit, nous sommes devant notre hôtel. Je me dis que je pourrais bien faire un tour devant la maison de l’hôte à qui on a fait faux bond. Il fait très chaud, me dis-je. Peut-être qu’il prend le frais devant sa porte. Je pourrais ainsi au moins lui présenter mes excuses. Aussitôt dit, aussitôt fait. Nous arrivons et nous trouvons une maison illuminée, une table dressée, et toute la famille réunie dans notre attente ! Aucune récrimination, aucune question. Nous nous attablons et nous dînons de nouveau pendant que nos hôtes nous éventent parce qu’il fait très chaud en cette période de l’année. A la fin du dîner, la jeune fille de la maison, Lata, offre une petite chaîne dorée à mon épouse…

 

Brahim Senouci

 

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